1. Tu ne modéliseras pas tes processus. La meilleure façon de ne pas se planter, c’est encore de ne rien faire ! Et puis les équipes en place connaissent très bien leurs métiers, elles ont tout dans la tête, tu n’as donc pas besoin de modèles pour savoir ce qu’il y a à faire. D’ailleurs, les cartes, c’est très surfait : tout individu est génétiquement doué d’un sens de l’orientation. Et puis, jusqu’à présent, personne ne s’est plaint… « Ô rage ! Ô désespoir ! Ô vieillesse ennemie ! N’ai-je donc tant vécu que pour ces processus ? » Pierre Corneille, expert en CID (Cartographie Inutile Désagrégée)
2. Tu n’impliqueras pas les métiers. Tu as longuement réfléchi et décidé de cartographier tes processus… Surtout ne va pas t’enquérir de la collaboration des métiers, à moins que tu n’aimes les discussions sans fin et les réunions tardives pour ne rien dire. Les métiers ont, de toute façon, autre chose à faire : si toute l’entreprise se met à produire de jolis dessins, ton boss s’apercevra un jour ou l’autre que la productivité n’est plus ce qu’elle était… Ton job non plus d’ailleurs.
« Je n’aime pas être trop impliqué » Bernard Tapis Danlombre, spécialiste en revêtements pour Parquet
3. Tu rejetteras les standards. Les industriels aiment se réunir au sein de très sérieux organismes comme l’OMG (Organisation des Méchants Gribouilleurs) pour définir des référentiels et autres standards-usines à gaz… Et alors ? Ce n’est pas une raison pour entrer dans leur jeu. Rappelle-toi : les normes c’est pour les autres, ceux qui n’ont pas d’imagination ! Et tant pis si tes vaillants successeurs se retrouvent tel Champollion devant ses hiéroglyphes.
« Tu t’es vu quand t’es standardisé ? » Tristan et ISO, légende médiévale
4. Tu mettras tous les processus sur un seul modèle. La modélisation, quelle mission grisante ! Une fois que l’on commence, on ne peut plus s’arrêter. Ce modèle sera ton chef-d’œuvre, tous les processus de l’entreprise seront décrits en une seule et même cartographie ! Le résultat s’avère peu lisible ? Pour s’y retrouver, il faut s’armer d’une loupe et de patience ? Peu importe, l’important c’est d’avoir la (vraiment) Big Picture. Ça fera bien sur ton CV…
« Tu seras un pilote de processus, mon fils » Rudyard Qui Plit, écrivain immergé dans la jungle des workflows
5. Tu ne prioriseras pas les processus à modéliser. Tu ne renonceras jamais à l’exhaustivité ! Tu es payé pour tout voir, tout contrôler. Tout : il faut tout modéliser, même le processus d’envoi des cartes de vœux ou celui du changement des cartouches d’imprimantes. On ne sait jamais : après tout, demain, ces processus seront peut-être devenus stratégiques pour l’entreprise.
« Tout, tout, tout, vous saurez tout sur l’processus. Le long, le court, l’touffu, l’complexe et l’inutile… » Pierre Perret
6. Tu oublieras de modéliser les rôles. Tu as passé assez de temps sur les modèles, tu ne vas quand même pas décrire également des rôles ? De toute façon, donner des droits aux utilisateurs, c’est superflu. Soit ils en abusent, soit ils les ignorent… Mieux vaut conserver un flou artistique dans ce domaine, comme cela on ne pourra vraiment rien te reprocher.
« La DSI doit contrôler tous les processus, mais on peut toujours s’arranger… » Silvio Berlusconi, cavaliere émérite peu à cheval sur les principes
7. Tu garderas ta cartographie dans un placard. Il ne faudrait pas que quelqu’un s’avise de modifier la cartographie que tu as amoureusement élaborée. Tu l’oublieras donc dans un placard. Tu expliqueras aux curieux que les processus n’évoluent jamais. Et que tu as juste produit une cartographie des processus pour faire comme tout le monde…
« C’est guère épais » Léon Tolstoï, amateur de gros volumes
8. Tu ne chercheras pas à améliorer les processus existants. Tu as vraiment envie de mettre en évidence des incohérences, comme des processus sans fin, des validations redondantes ou des étapes manquantes ? C’est la punition qui t’attend si tu œuvres pour améliorer les processus existants. Tu auras même la double peine car les utilisateurs ne se laisseront pas faire. Et ils s’y connaissent en résistance au changement, les bougres ! « Plutôt que de résistance au changement, j’aurais dû opter pour le changement de la résistance » François Claude, maître-nageur
9. Tu ne préciseras pas les règles métiers. Plutôt que de fournir un mode d’emploi pour que les processus soient bien compris et utilisés, tu préfèreras compter sur la longue expérience de tes collaborateurs. Ils sont en poste depuis des années, personne ne connaît mieux qu’eux les processus. Ah ? La moitié du service part en retraite dans deux mois ?… « La diagonale du flou, ça me connaît » Garry Casse-Pasrov, Grand Maître des échecs répétés
10. Tu ne modéliseras pas d’indicateurs de performance. Tu ne t’engageras pas sur le terrain glissant des indicateurs de performance. Surtout si, question performance, tu as des doutes sur les capacités de tes collègues. Tu ne terroriseras donc pas les métiers avec tes indicateurs et ne leur donneras surtout pas l’occasion d’émettre des bonnes idées pour améliorer les processus. Il faudrait recommencer à zéro….
« J’adore analyser les chiennes de valeur » Rin Tin Tin, animal néanmoins fidèle
11. Tu n’utiliseras pas d’outil logiciel. Tu plébisciteras le travail manuel. En matière de cartographie, c’est d’ailleurs très valorisant. Éventuellement, tu prescriras de l’ « Excelite » avec des morceaux de Powerpoint, mais à petites doses. Ça occupera tes équipes, celles des directions métiers et, si cela ne suffit pas, une armée de stagiaires finira le travail.
« I dit it… my process » Elvis Presley, King développeur chez Graceland Software
12. Tu maudiras la modélisation collaborative des processus. Tu as lu dans ton ouvrage de chevet Le BPM pour les mal-comprenants et les raides-dingues des référentiels que rien ne vaut une approche collaborative pour optimiser la modélisation des processus, tenir compte des différents profils d’utilisateurs et homogénéiser les disparités. N’en crois rien ! Y’en a qui ont essayé, ils ont eu des problèmes…
« Touchez mon processus, Monseigneeeeuuuurrr ! » Chevalier de Lagardère, bossu de naissance suite à un raté dans le processus
13. Tu ne prôneras jamais l’amélioration continue. Tes collègues te le confirmeront : amélioration continue = ennuis non moins continus ! C’est mathématique, logique, cartésien… Tu ne t’engageras donc jamais dans une démarche d’amélioration continue. Sauf si tu veux perdre ton temps dans tes multiples réunions et finir ta carrière à optimiser les processus dans un hôpital psychiatrique…
« L’amélioration continue est toujours devant toi mais tu auras la dégradation non moins continue à chaque fois que tu feras demi-tour » Pierre Dak de Larou de Deming, noble expert de la méthode PDCA (Plante, Décampe, Camoufle et Abandonne) pour mobiliser les troupes de bras cassés